Remous multiples suite au verdict clément émis pour le mari meurtrier de Diane Yangwo
- observatorioumofc
- 30 juin
- 3 min de lecture

Esther Nyacke Ntah
Community Manager OMF, Zone Afrique francophone
« 52000F CFA (79 euros) c’est la modique amende prévue pour ton bourreau », voilà le slogan que les femmes du Cameroun ont scandé le 4 avril 2025 après le verdict qui a été prononcé contre le sieur Eric Bekobe pour avoir battu à mort son épouse Diane Yangwo.
Le 18 novembre 2023, les média annonçaient avec consternation le décès de Mme Diane Yangwo, une enseignante de lycée, suite à la bastonnade de son époux, M. Eric Bekobe, employé de banque.
Plusieurs versions des faits ont été relayées à l’annonce de la mort de cette dame. La version qui nous est parvenue souligne que Mme Diane Yangwo était hospitalisée dans une clinique avec son enfant malade. Puis un jour, son mari est arrivé à l’hôpital en colère, l’a traînée dans une pièce libre pour discuter. Mais, le ton du couple est monté. Excédé sans doute par les reproches de son épouse, M. Bekobe a fini par porter la main sur elle. Il l’a frappée si fort que Diane a fait un malaise après leur dispute. Bien que conduite urgemment à l’hôpital, Mme Bekobe est décédée et le diagnostic clinique a indiqué que sa mort a été causé par une hémorragie interne provoquée par des coups violents. A l’annonce du décès de Diane, M. Bekobe a aussitôt été placé en détention provisoire pour coups mortels sur son épouse.
En février 2025, M. Eric Bekobe a plaidé coupable lors d’une audience au Tribunal de Grande instance de Douala. Suite à ces aveux, tous les partisans de la victime étaient désormais convaincus que M. Bekobe écoperait d’une lourde peine, surtout que l’article 221 du code pénal condamne à 30 ans de prison toute personne qui ôte volontairement la vie à une autre. Mais, le 1er avril 2025, à la grande surprise de tous, la juge Dany L’or Medou a plutôt infligé à M. Eric Bekobe une condamnation de cinq ans d’emprisonnement avec sursis et une amende de 52000F CFA seulement. Une sentence qui signifie que l’époux meurtrier de Mme Diane Yangwo sera purement et simplement relaxé. Ce jugement, un peu trop clément pour une cause d’assassinat, a aussitôt suscité des mouvements d’humeur à travers le pays.

Le slogan publicitaire de la Coalition camerounaise contre les violences faites aux femmes et aux filles
Les mouvements de protestation
Après le verdict de la magistrate Dany L’or Medou sur l’affaire Yangwo, de nombreuses voix féminines ont manifesté leur indignation, en arguant que ce jugement est trop favorable pour ce meurtrier. Bien plus, ces contestataires estiment que ce verdict laisse entrevoir la légèreté avec laquelle la justice camerounaise traite la question des violences faites aux femmes. Scandalisée par ce gros mépris pour la souffrance de la femme, l’écrivaine Djaïli Amadou Amal, reconnue pour sa défense des droits des femmes, a aussitôt saisi le Président de la République du Cameroun, via le ministre de la Justice pour réclamer un jugement plus juste pour Mme Diane Yangwo. Quant à la musicienne camerounaise Kareyce Fotso, elle a exhorté toutes les femmes en couple à privilégier leur bien-être et leur sécurité : « il vaut mieux vivre seule et en sécurité que de rester dans une situation dangereuse », a-t-elle clamé. De son côté, la Coalition camerounaise contre les violences faites aux femmes a décidé d’organiser une journée de protestation en mémoire de Diane Yangwo. Le vendredi 4 avril 2025, les membres de ce mouvement se sont dressés face aux autorités du Cameroun, pour exiger une justice plus équitable pour Mme Diane Yangwo et dénoncer le déni des violences à l’endroit des femmes dans notre pays. Outre les protestations, une pétition a été lancée dans les réseaux sociaux pour la révocation de la magistrate Medou Dany L’or.
Quid des féminicides au Cameroun ?
Le verdict donné sur l’affaire Diane Yangwo le 1er avril 2025, est la preuve que la justice camerounaise trivialise encore les questions de violence à l’encontre des femmes. Pourtant, les associations de défense des droits humains, et notamment le Ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille (Minproff) soutiennent que le taux de féminicides s’accroît au Cameroun. Pour le Minproff près de 80 cas de féminicides ont été recensés entre janvier et mai 2023 au Cameroun. Et l’Association de lutte contre les violences faites aux femmes (ALVFF) a renchéri en disant que ce chiffre est largement supérieur à celui de l’année 2022. Cette croissance de la maltraitance des femmes inquiète la gent féminine au Cameroun, surtout que la loi qui protège les femmes victimes de violence n’a pas encore été mise en place. Il ne reste plus qu’à espérer que la clameur suscitée par « l’affaire Diane Yangwo » incite finalement le Ministère de la Justice à adopter un code anti violences faites aux femmes.



Commentaires